Quel champ électromagnétique près d'une antenne?


On est habitué à traiter des champs à grande distance de l'antenne car les antennes servent à établir des liaisons plutôt lointaines que proches. Or il se trouve que le champ à grande distance s'exprime assez simplement. Mais dès qu'on veut« voir» ce qui se passe près de l'antenne, on a à faire à des champs d'expression compliquée, beaucoup moins faciles à se représenter. L'objet de cette note est précisément d'essayer de« voir» à quoi ressemblent les champs près d'une antenne. C'est regrettable, mais il est impossible de le faire sans un peu de mathématiques. Nous allons essayer d'en faire le moins possible. Les notations adoptées sont celles, classiques, utilisées par Robert E. Collin (Case Western Reserve University) dans son traité« Antennas and Radiowave Propagation» édité par« McGraw-Hill Book Company».

 

1- Hypothèses adoptées:

Nous nous intéressons au cas classique d'un court filament de courant I.dl placé dans le vide, car c'est à partir de ce cas particulier qu'on peut obtenir, par intégration curviligne le long de toute antenne filiforme son diagramme de rayonnement. Nous adoptons un système de coordonnées sphériques, particulièrement adapté à notre cas du fait de sa symétrie de révolution (cf. illustration n°1). Dans ce qui suit, un certain nombre de symboles sont utilisés. Bien qu'ils soient habituels, on en rappelle la signification (cf. illustration n°2) :

 

2 - Constatations:

Dans ce système, les équations de Maxwell donnent directement la valeur du champ électrique (cf. illustration n°3)
 

et celle du champ magnétique (cf. illustration n°4) :

 

Quelques constatations: .

1- les vecteurs E et H sont bien présents en tout point de l'espace

2- ils comportent des termes réels et des termes imaginaires en tout point 3- ils comportent des termes en puissances de (l/r) allant de 1 à 3

La constatation 1 signifie qu'il n'y a aucune région de l'espace qui ne comporte qu'un champ exclusivement magnétique, la constatation 2 qu'on peut s'attendre à trouver de la puissance active et de la puissance réactive, la constatation 3 que les « allures» des champs près et loin de l'antenne seront différentes.

 

Pour simplifier la suite de l'approche, nous allons nous intéresser uniquement à ce qui se passe dans le plan de symétrie xOy, où se concentre l'énergie rayonnée. Les expressions des champs électrique et magnétique se simplifient alors (cf. illustration n°5) :

 

On peut immédiatement en déduire la densité d'énergie rayonnée à travers un élément de surface en calculant le vecteur de Poynting (cf. illustration n°6)  :

 

On voit que:

- qu'on soit près ou loin de l'antenne, ce vecteur est normal à la sphère centrée sur l'antenne et passant par le point considéré

- qu'on soit près ou loin de l'antenne, ce vecteur comporte une partie réelle inversement proportionnelle

au carré de la distance dirigée vers l'extérieur de la sphère: il y a donc rayonnement d'énergie active et elle se conserve globalement

. qu'on soit près ou loin de l'antenne ce vecteur comporte une partie imaginaire inversement proportionnelle à la puissance 5 de la distance: il y a donc «énergie réactive» (attention car cette expression n'a pas à proprement parler de signification énergétique, elle traduit la présence d'un déphasage entre champs)

- quand on est loin de l'antenne le terme réel prévaut car il devient « infiniment grand par rapport au terme imaginaire », ce qui signifie que seule la puissance active est rayonnée à grande distance (il reste de la puissance réactive mais en proportion négligeable)

- quand on est près de l'antenne le terme imaginaire prévaut car il devient« infiniment grand par rapport au terme réel », ce qui signifie que la puissance réactive est concentrée près de l'antenne (il y a aussi de la puissance active, ne serait-ce que parce qu'il faut bien qu'elle traverse la proximité de l'antenne pour aller au loin, mais en proportion négligeable).

On peut aussi calculer deux produits, scalaires cette fois, qui donnent une idée des « énergies actives portées respectivement par le champ électrique et par le champ magnétique (cf. illustration n°11) :

On voit en particulier que:

- à grande distance, comme ce sont les termes en l/r qui prévalent, le rapport des deux énergies est constant et indépendant de la distance, ce qui tient au fait que les modules de E et de H sont proportionnels

- près de l'antenne en revanche, l'énergie électrique varie comme l/r6 alors que l'énergie magnétique varie comme l/r4, ce qui signifie que plus on se rapproche de l'antenne, plus la part d'énergie électrique devient prépondérante, ce qui est en contradiction avec ce qui est dit dans l'article de QEX.

Ce dernier point peut d'ailleurs se voir autrement si on reprend, à partir des formules de l'illustration noS, les valeurs des champs à proximité de l'antenne, c'est-à-dire en ne conservant que les termes en r de degré le plus élevé (cf. illustration n°8) :

On voit que le champ E proche devient infiniment grand par rapport au champ H quand on se rapproche de l'antenne, ce qui signifie qu'on y a surtout un champ électrique.